Florian Bruzzo : En 2012, j’étais le seul à y croire… Mais les choses ont changé

Interview de Florian Bruzzo par wpdworld.com

traduite par France Water-polo

Florian Bruzzo - Trieste

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Cela faisait vingt-quatre ans que la France n’avait plus participé aux Jeux Olympiques. La France, grâce à sa quatrième place obtenue lors du tournoi pré-olympique à Trieste en Avril dernier, est probablement l’équipe la plus heureuse d’aller à Rio de Janeiro.

Nous en avons parlé avec l’entraîneur français Florian Bruzzo, qui est à Bari, jusqu’au 10 Juillet, avec son équipe dans le cadre de la préparation de l’équipe de France.

La France va aller aux Jeux Olympiques 24 ans après sa dernière participation : êtes-vous encore en train de célébrer cette qualification ?

Ce n’est plus le moment de faire la fête, nous devons travailler. Peut-être que dans 40 ans, quand nous serons plus âgés, nous pourrons nous souvenir de ce que nous avons fait et s’en réjouir. Mais pour le moment, nous devons uniquement penser et de se préparer pour Rio.

Florian Bruzzo 01

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Après Trieste vous avez été soupçonnés, par la Fina, d’avoir délibérément perdu le match contre le Canada à Trieste. Avez-vous eu peur d’être disqualifiés ?

Jamais… Nous méritions la qualification et honnêtement je n’étais pas en mesure de comprendre tout ce tapage au sujet du résultat face au Canada. Le Canada est une grande équipe, ils ont accroché la Hongrie alors que nous avons perdu de 7 buts contre eux. Je ne comprends pas pourquoi la défaite de la France contre le Canada était si surprenante.

Votre présence à Rio 2016 vient juste après votre 9ème place aux Championnats d’Europe à Belgrade, votre meilleur score depuis les Championnats du monde en 1986. Est-ce une preuve du progrès du Water-polo français ?

Oui, c’est le résultat de l’expérience que nous ont apporté certains entraîneurs étrangers. Je pense notamment au travail de Nikola Stamenic, l’un des maîtres de Water-polo dans le monde, Paolo Malara ou Petar Kovacevic, qui ont apporté leurs connaissances au Water-polo français. Ils ont formé plusieurs joueurs qui sont ensuite devenus entraîneurs et qui ont fait progresser le niveau du Water-polo français. Par exemple, Samuel Nardon, qui était le capitaine de Malara à Nice et l’assistant de Kovacevic en équipe nationale, est maintenant entraîneur à Nice. J’ai moi-même beaucoup appris de Kovasevic. Grâce au travail de ces personnes, la France a commencé à voir le Water-polo différemment, et c’est ce qui nous a permis de progresser.

Les clubs français semble s’améliorer. Marseille a fait très bonne impression en Champions League contre Primorje et Szolnok, puis ils sont arrivés en quarts de finale à l’EuroCup.

Si vous atteignez les Jeux olympiques, cela signifie que l’équipe nationale a progresser, mais aussi l’ensemble du Water-polo français, ainsi que la Fédération et les clubs. Pour aller aux Jeux Olympiques, il faut que toutes les planètes soient alignées. En 2012, quand j’ai commencé avec l’équipe nationale, j’étais le seul à y croire : maintenant, les choses ont changé.

Quelle importance a eu la Ligue Promotionelle de Water Polo pour le développement du waterpolo français ?

Ce fut très important et la fédération a bien fait de soutenir la LPWP en leur laissant l’autonomie nécessaire pour développer le waterpolo et contribuer à sa croissance .

Qu’en est-il des jeunes joueurs français ? Y a-t-il une relève pour suppléer à l’équipe nationale actuelle et continuer la progression ?

Ceci est un énorme problème. Beaucoup de joueurs qui ont obtenu la qualification pour Rio ont grandi à l’INSEP (Institut National du Sport de l’Expertise et de la Performance). C’est une école où les joueurs pouvaient s’entrainer et continuer leurs études. Ensuite, cet institut a été fermé. Avant sa fermeture, nous avons réussi à obtenir d’excellents résultats chez les jeunes comme, par exemple, une 5ème place aux Championnats d’Europe U19, à Oradea, en 2006. Puis nous nous sommes arrêtés là. En effet, nous ne participerons ni aux prochains Championnats d’Europe U19 ni aux Championnats du monde U18.

Pourtant, pendant le Festival International HaBaWaBa nous beaucoup d’équipes françaises qui participent. Le problème vient à l’adolescence ?

Oui, en effet, les jeunes abandonnent souvent le Water-polo à cause de leurs études. En France, il est assez compliqué de concilier les études et le Water-polo de haut niveau. Jusqu’à l’âge de quinze ans le niveau est assez bon, mais après, les jeunes progressent moins. Pour cette raison, nous tentons de développer un projet au travers de certaines installations où les joueurs pourraient étudier et s’entrainer. C’est un double projet : un pour les collégiens et l’autre pour ceux qui fréquentent l’université.

Ugo Crousillat 02

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Pour revenir à votre équipe de France, vous avez un bon gardien Garsau et deux très bonnes pointes , Blary (qui vient d’être transféré à BPM Sport) et Camarasa. Qui y a-t-il d’autre?

Ce sont de grands joueurs très sous-estimés. J’ai beaucoup de chance de travailler avec eux. Les dernières échéances internationales leur a permis de beaucoup progresser et d’apprendre beaucoup de choses. Je n’aime pas parler individuellement des joueurs, je pense que dans l’ensemble j’ai une grande équipe.

Y a t-il quelqu’un qui pourrait encore progresser ? Quelqu’un en qui vous attendez plus pendant les Jeux Olympiques ?

Je pense que Ugo Crousillat pourrait être un joueur encore plus fort. Il aime Water-polo, il s’entraîne beaucoup et durement et c’est un excellent gaucher (la saison prochaine, il jouera pour Szolnok). Psychologiquement parlant, il va passer un cap. C’est déjà un leader, mais il doit aussi l’être quand on joue face à de grandes équipes.

A Rio, en 2016 , vous serez confronté à un groupe avec l’Italie, la Croatie, le Monténégro et les États-Unis. Quelles sont vos perspectives ?

En 2012, je disais que je voulais être aux Jeux Olympiques et personne ne croyait que nous pouvions le faire. Maintenant, personne ne nous attend et c’est mieux comme ça. Nous pourrions être la surprise des Jeux. A Trieste, personne n’aurait parier sur notre qualification pour Rio.

Est-ce que Michael Bodegas vous aurait fait du bien ?

J’ai promis à mon équipe de ne pas parler de Bodegas. Il a fait un bon chemin avec nous et je ne peux pas oublier ce qu’il a fait pour cette équipe. Je lui souhaite le meilleur avec l’Italie.

Interviews 2 juillet 2016