Entretien avec Florian Bruzzo

Entretien avec Florian BRUZZO

Sélectionneur de l’équipe de France Masculine

« Nous arrivons désormais à maintenir ce niveau sur des périodes entières »

Au sortir d’un Euro réussi avec l’équipe de France, le sélectionneur national,  Florian Bruzzo a accordé un entretien à France water-polo, où il a accepté de revenir sur l’Euro et sur l’actualité du water-polo.

 

 

Revenons tout d’abord sur cet Euro. Es tu un sélectionneur satisfait aujourd’hui, par rapport aux objectifs qui étaient fixés au départ ?

Je suis mitigé dans la mesure où nous sommes qualifiés pour le tournoi pré olympique, nous avons progressé depuis la dernière édition, mais nous aurions du faire mieux sur certains matchs notamment le Monténégro.

 

Sur l’ensemble des matchs, le jeu de l’équipe de France a t-il répondu à tes attentes ?

En terme de jeu, nous avons développé des séquences intéressantes. C’était déjà le cas auparavant, mais nous arrivons désormais à maintenir ce niveau sur des périodes entières. Maintenant nous devons continuer le travail afin de réussir des matchs entiers.

 

On se souvient de ce match de poule contre la Serbie (championne d’Europe et du monde), devant plus de   11 000 spectateurs, avec le déroulement que l’on connaît. Que peut bien dire l’entraîneur dans le vestiaire et à la mi-temps du match ?

La mi temps est un moment assez court en définitif. Je rappelle juste l’organisation souhaitée, régule 2-3 points précis, notamment sur les attentes individuelles.

 

Quand on regarde justement le match contre la Serbie et celui du Monténégro, on voit que vous êtes capables de rivaliser, mais au final cela se joue sur des détails. Que manque t-il aujourd’hui à cette équipe de France sur ce genre de rencontre ?

Il nous a manqué parfois de la discipline. Mais au delà de ça, il nous manque de l’expérience à ce niveau. Tu parles des joueurs des Balkans. Si l’on regarde leur parcours au niveau international, combien de matchs de haut niveau ont-ils joué depuis qu’ils ont 14 ans, équipe nationale et clubs compris ? Des centaines… Nous ?

 

L’écart s’est, néanmoins, nettement réduit avec toutes ces nations du top mondial. Cela montre les progrès de cette équipe de France. La marge de progression de l’équipe est-elle encore grande ?

La marge est grande effectivement. Sur des phases précises de jeu, sur l’abord des compétitions, il y a du travail. Mais là où le club travaille au jour le jour, l’équipe nationale le fait année après année. La temporalité n’est pas la même. Cette équipe se construit depuis 10 ans.

 

On a parlé du match de la Roumanie comme le match référence de la sélection depuis que tu en es le sélectionneur. Est-ce ton avis également?

Match référence oui et non. Bon match oui, en terme d’application, de jeu. Avec du recul, nous avons eu de la « réussite » et même si elle se provoque il ne faut pas l’éluder dans le bilan.

 

Vous rendez-vous compte que vous êtes sur le point d’écrire quelque chose de grand dans l’histoire du water-polo français ?

Qu’a t’on gagné, mise à part le droit de penser que l’on a une chance de participer aux jeux olympiques ?
L’histoire du water-polo français est un titre de champion olympique, des médailles chez les dames, donc appliquons nous à écrire notre propre histoire.
Et quand je dis écrire c’est travailler au quotidien plus que les autres pour pouvoir prétendre à… Le reste c’est de la philosophie

 

 

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Difficile de ne pas te poser la question. Avec un Michael Bodegas dans ses rangs à Belgrade, la France aurait-elle pu viser plus haut ?

Il est intéressant de constater que le meilleur joueur de l’équipe d’Italie est français.

 

Justement en tant que sélectionneur, tu as dû te passer à un moment donné de joueurs partis jouer pour un autre pays (Bodegas/Italie, Crousillat/Monténégro) et d’un autre côté, tu as choisi de composer avec des joueurs naturalisés français (Tomasevic, Kovacevic, Nastran). Quel est ton avis sur la question de la naturalisation dans le water-polo ?

Je suis entraîneur. Mon métier, c’est de constituer une équipe de joueurs en adéquation avec les règlements internationaux, pour faire la meilleure équipe  possible.

 

Penses tu que dans les années à venir la France a les moyens de s’installer dans le top 8 européen, voir mondial ?

La performance au niveau international est la résultante d’un système complexe. L’équipe de France de 2016 n’est que le résultat du travail de tout un ensemble depuis 15 ans. Les clubs, leurs entraîneurs, les cadres fédéraux et la politique fédérale.
Il m’est donc difficile de répondre à cette question, tant je ne maîtrise pas tous ces paramètres.

 

Quel est le programme jusqu’au tournoi qualificatif olympique ?

Le programme est complexe à élaborer. Il est difficile de trouver des lieux de stage en France à cette époque de l’année, notamment à cause de la disponibilité des bassins.
Nous essayons d’organiser à l’étranger, mais nos voisins sont engagés dans les coupes d’Europe et dans leurs championnats domestiques. L’idée c’est 2 périodes distinctes, une en Grèce et une dans les Balkans, mais rien n’est figé.

 

Si le 3 avril il n’y a pas de blessés, est ce que l’on verra ce même 13 tricolore jouer le tournoi qualificatif olympique ?

Aucune idée…

 

Si on veut que le water-polo émerge réellement en France comme d’autres sports auparavant, on sait que cela passe par les performances de l’équipe de France. Penses tu que la France sur un podium d’une grande compétition internationale puisse donner un vrai coup d’accélérateur sur la médiatisation du water-polo en France et les conséquences que cela peut engendrer ?

Evidemment que la participation et la réussite lors des compétitions à résonance mondiale promeut notre discipline.
Mon avis est que nous devrions tenter de rentrer dans les écoles via les programmes de l’éducation physique et sportive à l’école. Cela serait le meilleur moyen de développer et de démocratiser notre sport.

 

Michael Bodegas nous disait dernièrement dans un entretien (15 janvier 2016), “Tout ce que je peux dire d’un point de vue extérieur c’est que les Italiens ont beaucoup appris des joueurs étrangers qui ont évolué dans leur championnat. Moi même, à Marseille, ma progression je la dois aux joueurs étrangers qui m’ont inspiré tout au long de mes 13 années à Marseille. Le fait de réduire le nombre d’étrangers aurait dû permettre aux clubs de concentrer leur budget sur des joueurs étrangers de niveau international.
Aujourd’hui les Français sont meilleurs que les étrangers alors que l’équipe de France ne fait pas encore partie du top 8 européen.”

Penses tu qu’ aujourd’hui, dans le championnat, les clubs pourraient voir plus grand lorsqu’il s’agit de prendre des étrangers et permettre ainsi d’élever le niveau ?

Si la question est de savoir s’il reste des Ivlev, Belofastov, Janovic en Pro A, clairement non.
Maintenant si les clubs ne recrutent plus ce type des joueurs, j’imagine que ce choix est motivé par des orientations sportives différentes, notamment sur les arbitrages financiers qui permettent à nos internationaux d’avoir un vrai statut.

 

Entretien réalisé par France-waterpolo 

 

 

Interviews 16 février 2016